Alors que le premier festival belge du podcast, Brussels Podcast Festival, est organisé la semaine prochaine, nous avons été à la rencontre de plusieurs créatrices de podcasts belges afin de mieux comprendre les enjeux et les personnes derrière les projets.
La toute première édition du Brussels Podcast Festival aura lieu à L'Atelier 210 du 28 février 2020 au 1 mars 2020. Le BPF est une initiative collective portée par des passionné·es du podcast ainsi que des professionnel·les du secteur de la création radio, du journalisme et du milieu culturel. Un festival qui réserve une place à la création belge tout en affirmant une programmation internationale qui fasse écho au statut européen de la ville de Bruxelles.
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Le podcast “Salade tout”
Dans ce podcast qui allie culture food et questions de société, Axelle Minne et Elisabeth Debourse investiguent tendances alimentaires et habitudes culinaires avec une vision engagée de l’alimentation.
Cliquez ici pour lire l'interview d' Elisabeth Debourse
D'où vous est venue l'idée de lancer le podcast ‘Salade Tout’ et quels sujets abordez-vous ?
Avec Axelle Minne, avec qui j’ai monté le projet de « Salade Tout », nous étions fatiguée de n’entendre parler d’alimentation que sous le prisme de la santé ou de la critique de restaurants. Pour nous, le sujet était (et est) politique et sociologique. Nos assiettes parlent de nous, et c’est ce que nous avions envie de raconter. À travers les dix épisodes de la première saison, nous avons donc abordé des sujets tels que le fait de manger seul, les cantines scolaires d’hier et d’aujourd’hui, les liens entre sexe et nourriture, etc. Mais nous voulions aussi que les Belges en particulier puissent se retrouver dans ce podcast. C’est pour cela que nous avons aussi travaillé sur la frite comme objet historique et le phénomène des brasseries indépendantes.
Pourquoi avoir choisi ce format, plutôt qu'un autre ?
Honnêtement, nous avons d’abord choisi le format parce que nous sommes nous-mêmes de grandes amatrices de podcast. On avait envie de le tester, nous aussi, même si nous n’avions que très peu travailler dans le son auparavant. Mais on s’est très vite rendues compte qu’il nous permettait aussi d’apporter de la « couleur » à nos sujets. Entendre un accent belge, des frites dans de l’huile ou encore une voix émue, ça change tout. On a en revanche essayé de travailler de manière très professionnelle, justement pour mettre en valeur ce son. L’idée pour nous n’était pas de lancer un podcast « de copains », avec un téléphone. Du coup, ça nécessite beaucoup de travail, qui va à l’encontre de l’idée de liberté et spontanéité qu’on se fait du format — injustement à mon avis.
“Salade Tout” est soutenu et financé par la RTBF (webcréation). Est-ce que cela couvre l'entièreté des dépenses du podcast? De manière générale, est-ce que le format podcast peut-il être rentable?
Le contrat qui a été signé avec la RTBF et la Fédération Wallonie-Bruxelles portait sur la première saison, soit dix épisodes — plus un bonus, avec enregistrement en public. Nous aimerions poursuivre avec une nouvelle saison et avons donc recontacté la RTBF, qui a la priorité. La balle est maintenant dans leur camp. Que le podcast soit subventionné ou qu’il fasse l’objet d’un partenariat en sponsoring, par exemple, je ne pense pas qu’on puisse dire que ce soit un format très « rentable ». Aujourd’hui du moins. Pour obtenir une qualité professionnelle, qui est pour moi l’un des points-clef du futur du podcast, il faut investir. Si l’on regarde les exemples de sociétés de production qui fonctionnent, elles se diversifient toutes. Autour du son, certes, mais pas que dans le podcast.
Quels sont vos conseils pour les personnes qui souhaitent lancer leur premier podcast?
Je conseillerais à ceux qui veulent se lancer dans le podcast de réfléchir pourquoi ils le font. Il n’y a pas de mauvaise raison : ouvrir un débat, discuter entre potes sans tabou, raconter une histoire jamais entendue, s’amuser dans la création sonore… Mais pour moi, il faut que cet objectif guide tout le travail et se ressentent dans le résultat final. Il faut le faire à fond.
Est-ce que vous pouvez nous parler un peu plus du Brussels Podcast Festival qui aura lieu à Bruxelles (en février/mars 2020) ?
Le Brussels Podcast Festival aura lieu du 28 février au 1er mars 2020, principalement à l’Atelier 210 — mais pas que. C’est un événement qui célèbre la richesse du podcast : il y aura donc des conférences, des représentations inédites, des enregistrements live, des rencontres et des discussions avec ceux qui font le podcast en Belgique et à l’international, des écoutes, etc. La programmation est franchement aussi riche que le format. Je crois que ça va vraiment être passionnant et important pour la scène podcast belge.
L'année 2020 sera-t-elle "l'année du podcast" en Belgique?
Je ne sais pas si 2020 sera l’année du podcast en Belgique. Peut-être a-t-on raté le grand « boum » qui a eu lieu en France ou aux États-Unis, par exemple. Comme toujours, on fait les choses avec modération en Belgique. Ce qui ne nous empêchera pas, j’en suis sûre, de sortir de belles productions dans les années à venir. Parce que le podcast a un futur, ça c’est sûr…
Le podcast ‘Salade tout” est disponible sur Auvio, YouTube, iTunes, SoundCloud et les applications de podcast habituelles. Suivez toute l'actu de "Salade Tout" sur le compte Instagram @saladetout et la page Facebook RTBF Webcréation.
Le podcast 'La Flamme'
Tiffany Coune et Amélie Beerens, sont les deux femmes bruxelloises à l’origine du projet de podcast La Flamme.
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Pouvez-vous nous parler de votre podcast 'La Flamme'?
Cela part de nos nombreuses réflexions et conversions autour d’un (ou plusieurs) verre de vin… des soirées à refaire le monde. Nous sommes toutes les deux des femmes passionnées et nous avons voulu explorer le thème de la passion et confronter notre idée de la passion auprès de gens qui inspirent, qui captivent et qui fascinent par leur implication, leur accomplissement et … surtout par l’énergie qu’il dégagent.
La flamme qui les anime, qui les guide, les pousse à réaliser des choses, les entraîne dans des aventures humaines et parfois les brûle. Avec ce podcast on veut partager des moments privilégiés avec ces personnes, qu’elles nous expliquent ce qui anime cette flamme et comment, au quotidien, elles vivent avec une flamme dans le cœur, dans les tripes.
Ce podcast est un livre audio, chaque personne y ouvre un chapitre racontant sa flamme. Avec la diffusion des ces histoires, nous souhaitons inspirer les gens, tout simplement.
Pourquoi avoir choisi ce format, plutôt qu'un autre ? A-t-on plus ou moins de libertés?
Nous adorons ce média qui fait partie de notre quotidien: en cuisine, sur le vélo, dans le tram, dans un parc, … on est des grandes consommatrices de podcast. On aime particulièrement ce format qui permet une intimité avec les auditeurs. On a les voix dans les oreilles et souvent un podcast s’écoute seul.
Ensuite on aime avoir une liberté totale. Il existe déjà des podcasts sur tous les sujets et pour tout le monde ! Le podcast est gratuit et vraiment facile d’accès.
De plus, les créateurs de podcast ont l’occasion d’exprimer leur créativité pour un budget raisonnable. Par exemple, nous avons commencé de zéro avec un investissement de 120 euros pour un micro, les logiciels de montage sont gratuit… et il a plein de vidéos de tutoriels disponible pour apprendre à monter le son!
Est-ce que le format podcast peut être rentable à l'heure actuelle?
Les podcast animent et rassemblent des communautés de gens qui deviennent des cibles engagées et intéressantes pour promouvoir des idées ou des produits.
Il y a des podcast très professionnels créés par des équipes de profils techniques pointus et puis il ya les podcasts complètement amateurs.
Dans les deux cas, le podcast n’est pas rentable en tant que tel. On le considère plus comme un outil de communication qui, pour le moment, est soumis au même modèle de revenu que les autres média… c’est-à-dire l’utilisation de la publicité en vendant l’attention des auditeurs et/ou fans de podcasts.
De plus en plus, on voit apparaître une valorisation des créateurs de contenus de podcast par la production pour des marques directement. Comme on pourrait imaginer qu’on rémunère un copywriter pour l’écriture d’articles qui véhiculent les valeurs ou vante les produits d’une entreprise.
Certains professionnels comme des coachs, des thérapeutes, des consultants ou autres métiers de services, utilisent le podcast dans leur stratégie de contenu au même titre qu’un article de blog ou une vidéo youtube. Dans ce cas, la rentabilité est plutôt mesurée en terme de prospection sur les services proposés.
A nouveau et à l’instar du potentiel créatif, on voit l’étendue de possibilités qu’offre le podcast.
Avez-vous des sources de financement?
La Flamme est auto-financée et n’a pas d’ambition de rendement. L’idée est vraiment née d’une idée de transmission avec éventuellement, et depuis peu, une timide ambition de créer une communauté de gens passionnés qui pourrait enrichir nos réflexions ou nos rencontres.
Est-ce votre activité principale?
Non, nous avons chacune une activité à temps plein. La Flamme c’est notre hobby qui nous rassemble plusieurs heures par mois.
Quels sont vos conseils pour ceux qui souhaitent lancer leur propre podcast? Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrés?
Foncez! Franchement, c’est un média abordable sans formation au préalable et qui demande un minimum d’investissement. Il vous faut un ordinateur et un micro !
La preuve en est… nous n’étions pas du tout formée dans la production de média audio et grâce à notre motivation et de la persévérance, on est maintenant à notre 10 ème épisode, on fête bientôt nos 1 an et on nous avons de plus en plus d’écoutes ! C’est vrai qu’on doit vous prévenir quand même qu’il ne faut pas être allergique aux problématiques techniques…
Quel est l'investissement (en temps) que prend la réalisation de chacun de vos podcasts ?
Le premier épisode nous a pris à peu près 3 jours et plein de doutes…Maintenant, de l’interview à la mise en ligne de l’épisode, on a besoin de plus ou moins 6 - 7 heures. On est 2 sur le projet et donc on fait tout à deux. La prise de son, le montage, les publications et la communication. On est de vrais petits couteaux suisse du podcast!
Le podcast 'De la crème'
Lucy Hardy, coach en création de projet et podcasteuse, a créé le podcast 'De la crème'. Depuis quelques années, elle se passionne pour l’entrepreneuriat et accompagne au montage de projets créatifs.
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Pourquoi avoir lancé le projet ‘De la crème’, et quel(s) sujet(s) abordez-vous ?
Je suis une passionnée de podcast, une coach d’entrepreneur.es et une créative-entrepreneuse moi-même. C’est complètement bateau de dire ça, mais ça s’est vraiment imposé à moi. Je ne le dis jamais mais quand j’étais petite, j’adorais enregistrer de fausses interviews sur K-7 audio (les vrais comprendront) dans lesquels je parlais à des personnages imaginaires. Je passais des aprems entières à jouer à ça. Puis, je suis issue d’une famille de femmes, il me tenait beaucoup à cœur de promouvoir les projets féminins, la créativité, l’indépendance des femmes.
Pourquoi avoir choisi ce format, plutôt qu'un autre ? A-t-on plus ou moins de libertés?
J’aime l’audio, je suis très sensible à la musique, aux sons, j’aime ce qui se transmet par la voix. J’aime le fait de pouvoir choisir, sélectionner ce que j'écoute et de ne plus devoir subir les programmes imposés et ponctués de pubs qu’on entend à la radio. Avec le podcasting, j’ai une liberté totale. Je peux être créative et apporter mes valeurs. Et celles.ceux qui écoutent mes interviews font le choix de les écouter.
Est-ce que le format podcast peut être rentable à l'heure actuelle?
Rentable, oui, probablement. Pour monétiser son podcast, il faut d’abord avoir une grosse audience et accepter d’être sponsorisé par une marque. Personnellement, mon activité principale est le coaching de projets, je ne vis pas des podcasts. J'ai eu des propositions de sponsoring mais pas encore de la part de marques qui collent avec les valeurs que je partage.
Quels conseils donneriez-vous aux personnes qui souhaitent lancer leur propre podcast?
Le conseil principal serait de lancer un podcast sur un sujet qui leur tient vraiment à cœur. C’est beaucoup de travail, il faut pouvoir tenir sur le long terme pour développer l'audience et je pense que pour cela, il faut que le sujet les porte. Ensuite, rester soi-même et ne pas avoir peur d’être différent. C'est vraiment le plus important.
Quel est l'investissement en temps que prend la réalisation de chacun de vos podcasts ?
J’ai calculé que la réalisation d’un épisode me prend environ 20h de boulot. Sans compter tout le travail de promotion qu’il y a derrière.
Comment est-ce que vous trouvez et convainquez les 'invités' à participer à l'émission?
Pour le moment, la plupart des invitées étaient des amies d’amies, des femmes don’t je connaissais le projet ou des personnes qui se présentaient à moi. J’ai dû refuser quelques propositions qui ne rentraient pas dans les valeurs du podcast. Je souhaite vraiment interviewer des femmes vraies, qui n’ont pas peur de se montrer telles qu’elles sont. Je ne veux pas qu'on répandent les fausses success stories qu’on a l’habitude de voir partout et qui font croire que le chemin va être simple et culpabilisent celles qui vivent de gros downs par moment.